Depuis 1987 jusqu’à ce jour, je n’ai cessé d’appréhender la ville de Calcutta. Moi qui ne suis pas un grand marcheur, le but est de rencontrer, découvrir cette ville incroyable et déroutante me poussant à la traverser des dizaines de fois, appareil à la main. Oui je la connais. Mais peut-on la connaître ? Elle si démesurée, si rebelle, si explosée ? A toute heure du jour et de la nuit, j’ai écouté ses vibrations, ses énergies de vie et de mort. Je suis monté au sommet du pont d’Howrah (soumis à l’interdiction d’ être photographié) pour immortaliser sa structure dantesque. J’ai parcouru la ville dans l’ombre des mendiants lépreux sur la route de leurs supplications. J’ai fumé le chilum au bord du Gange pour être accepté par les Sadhus dans leur voyage de fin de réincarnation. Je me suis assis dans le salon de monsieur BK Birla, propriétaire entre autres des usines Ambassador, pour comprendre les dernières pulsations de la voiture mythique. Avec 160 000 clichés sur la ville et ses habitants, serais-je, sans m’en être rendu compte, devenu une mémoire photographique ? Si j’avais photographié Londres ou New York avec la même intensité, je serais indubitablement parvenu à faire connaitre mon travail avec plus de force. Avec Calcutta, la Princesse en guenille, je parviens tout juste à y inscrire un témoignage photographique. Mais pour moi elle me reste comme collée à la peau. Elle est un bout de mon destin.